L’Afrique francophone gagnée par la délocalisation de services

Les Afriques

Assistance technique, saisie de données comptables, back office pour de grandes compagnies d’assurances, prise de rendez-vous médicaux, vente par téléphone : la délocalisation de services est de plus en plus poussée. Après les pays à bas coût de l’OCDE tel l’Irlande, puis les pays émergents comme l’Inde ou l’Afrique du Sud, une troisième vague de pays fait surface, portée par le développement de la bande passante et l’accès Internet à haut débit. Sur le continent africain, ils sont quelques uns à vouloir surfer sur la vague : le Maroc, la Tunisie, le Kenya, l’Ouganda, mais aussi le Sénégal, le Mali, le Ghana ou le Nigeria.

Pressées de réduire leurs coûts, les entreprises françaises voient dans les pays d’Afrique du Nord et de l’Ouest une solution pratique à leurs besoins d’externalisation, question de langue et de proximité, et n’hésitent plus à recourir à des sous-traitants locaux (outsourcing offshore).

Pour autant, tous les pays francophones d’Afrique ne sont pas logés à la même enseigne. « Outre les infrastructures télécoms et Internet, il faut aussi une offre immobilière de bureaux adéquate, puis des compétences et de la notoriété. Au delà, il faut pouvoir développer la confidentialité des informations, comme c’est le cas en Inde», explique Martin Labbé, consultant international auprès du Centre du commerce international à Genève. A ce titre le Maroc et la Tunisie sont largement en tête, à la fois sur l’offshore informatique, l’externalisation de services (BPO, Business Process Outsourcing) et les centres d’appel.

A Casablanca, capitale économique du Royaume, le parc de CasaShore, avec ses 53 hectares et des coûts 30 à 50% inférieurs à l’Europe, fait le plein : Capgemini, Unilog, BNP Paribas, Axa, pour les filiales de grands groupes. Via ses plateformes de Casablanca et Rabat, BPO Services fait de la saisie comptable et du traitement de paie externalisée pour des sociétés françaises. Sur le créneau porteur des centres d’appels (environ 140 au Maroc, selon l’ANRT), Webhelp est leader, devant Phone Assistance et les Espagnols Atento et Grupo Konecta. Entre la France, le Maroc et la Roumanie, Webhelp emploie près de 5 000 personnes. Globalement, le secteur des call center au Maroc génère un chiffre d’affaires estimé à 3 milliards de dirhams (environ 2,6 milliards d’euros) et quelques 25 000 emplois (dont 18 000 téléopérateurs).

En Tunisie également, les centres d’appels ne cessent de croître, 130 estimés à fin 2007; des centres spécialisés dans la vente à distance, la relation clientèle, le télémarketing. Parmi les étrangers implantés : les Français Teleperformances, Mezzo (groupe 3 Suisses), Sellbytel, le Luxembourgeois Transcom World Wide ou l’américain Stream. Dans l’outsourcing, la Tunisie, qui s’appuie sur une main d’oeuvre qualifiée, commence à être reconnue dans le développement de logiciels et autres solutions informatiques. A l’instar du Maroc, elle mise sur les infrastructures. Le parc technologique des télécommunications El Ghazala, sur 65 ha, est considéré comme l’un des plus développés du continent. Il accueille notamment Alcatel, Ericson, Bilog et Huawei Technologies. La Tunisie favorise également le développement de technopoles et pépinières.

En Afrique de l’Ouest, le mouvement est perceptible, en particulier au Sénégal, mais il concerne des services de moindre valeur ajoutée, essentiellement le télémarketing et la télésaisie. A Dakar, Premium Contact Center International (PCCI) est une success story. Ce centre ouvert en 2002 est aujourd’hui le plus important du Sénégal, avec près d’un millier de positions. Ses clients s’appellent Orange, Neuf Cegetel, Bayer, Poweo ou Canal +. Sa réussite, il la doit à la fibre optique. «Le coût de la bande passante à l’international est très compétitif (…) Le Sénégal compte trois accès à la fibre optique. Même l’Afrique du Sud (leader sur le continent avec plus d’un millier de call center) ne compte pas autant de point d’accès », souligne Martin Labbé. Le Sénégal est relié aux câbles sous-marins Atlantis II (Europe, Sénégal, Amérique du Sud) et SAT 3/WASC/SAFE (Europe, Afrique de l’Ouest, Afrique du Sud, Asie), ainsi qu’au câble de garde à fibre optique CGFO (Sénégal, Mali, Mauritanie).

Au Mali, l’entreprise Ça Va est pionnière. Son créneau : la prise de rendez-vous et la gestion du secrétariat pour des médecins, mais aussi des PME-PMI en France. La révolution de l’Internet et des télécoms est à l’oeuvre. Reste que dans l’ensemble, le continent africain a encore du chemin à parcourir. Selon la Banque mondiale, l’Afrique détient le record pour le coût d’une liaison Internet avec des tarifs mensuels pouvant atteindre 180 à 214 euros.

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