Le pari industriel de Tanger prend forme
Jeune Afrique
Alors que les travaux de l’usine Renault-Nissan au Maroc n’ont pas encore démarré, les annonces d’implantations d’équipementiers se succèdent.
De la crise mondiale qui secoue le secteur automobile, il fait à peine mention. Emmanuel d’Arfeuille, responsable d’activité de la société française Faar Industry, est affirmatif : sa société ouvrira, début 2009, un bureau d’études à Tanger ou à Casablanca. « C’est la question des ressources humaines qui nous fait hésiter entre les deux », explique le responsable de cette entreprise spécialisée dans les systèmes électroniques de contrôle embarqués. Car, comme de plus en plus d’entreprises, elle est attirée par la volonté affichée du groupe Renault- Nissan de voir se développer sur le territoire marocain des activités de recherche et développement, dans la perspective du démarrage de son futur site de production de 200000 véhicules à l’horizon 2010 (400000 en 2013). De son côté, CIS Optim’AXES, PME française spécialisée dans la robotique, qui s’est déjà investie aux côtés de Renault en Roumanie, regarde le marché marocain très sérieusement, à l’instar du fabricant de pneumatiques Hutchinson. Attrait identique pour le groupe Sumika Polymer Compounds, détenu majoritairement par Sumitomo, le numéro deux du secteur pétrochimique au Japon. En partenariat avec Sodevic, une société locale de fabrication de caoutchouc, basée à Salé, dans la banlieue nord de Rabat, le groupe Sumika vise l’approvisionnement en polymères de l’ensemble des fournisseurs du constructeur travaillant dans l’injection plastique. Dans ce but, Sumitomo doit démarrer, en 2009, une nouvelle usine de polypropylène en Arabie saoudite, d’une capacité de 700 000 tonnes par an. « D’ici à 2010 nous en attribuerons autour de 5 000 tonnes pour le Maroc, et qui couvriront la totalité des besoins du pays », explique Mohamed Demnati, consultant pour Sumika.
Produire pour tout le groupe
Recherche et développement, transformation du plastique et du caoutchouc, robotique, pneumatique, mais également emboutissage, fonderie, fabrication de phares, les besoins de la future usine de Tanger, dont la construction devrait démarrer au premier semestre 2009, sont colossaux. Et si la crise frappe les esprits – Renault a annoncé la baisse de 25 % de sa production au quatrième trimestre et des suppressions d’emplois massives –, aucun développement ne semble actuellement remis en question au Maroc. Bien au contraire. Dans la perspective du démarrage de la production à l’horizon 2010, le constructeur français entend accompagner l’implantation de ses fournisseurs, dans la zone franche de Tanger, Tanger Med, où leur sont réservés 60 hectares pour leur installation. « Renault a décidé de mettre en place une liste de fournisseurs préférés, qui seront aidés, en particulier, pour leur mise à niveau », indique Jean-Claude Loffi, le directeur achats Renault Maroc. Objectif : atteindre un taux d’intégration local de 50 % pour les pièces automobiles, et de 80 % à terme. « Nos fournisseurs devront avoir la capacité de produire pour Renault et Nissan au Maroc, mais aussi pour tout le groupe Renault dans le monde entier », souligne Jean-Claude Loffi. Une chance à saisir pour le Maroc.
Passage à vide dans la zone franche
Si les investissements sont maintenus pour le port de TangerMed, la crise se fait sentir dans la zone industrielle. « Depuis quatre mois, la zone franche connaît une baisse d’activité », confirme Abdelilah Elmansar, responsable des relations internationales et institutionnelles de l’Agence spéciale Tanger Méditerranée (TMSA). Certains opérateurs parlent d’un repli de 15% à 20 %. Les plus affectées sont les entreprises les plus liées aux Européens. En raison des difficultés d’Opel, l’américain Delphi a réduit partiellement sa production. Toutefois, l’avenir marocain dans l’automobile reste dégagé tant la diminution des coûts est devenue une obsession mondiale. « Il y a quelques années seulement, les achats hors pays développés représentaient 5 % seulement. L’objectif est de passer à plus de 35% à l’horizon 2010 », explique Frédéric Motte, le responsable des achats internationaux chez PSA Peugeot Citroën.