Debora Kayembe, nouvelle rectrice d’Édimbourg, la troisième université la plus riche du Royaume-Uni

Debora Kayembe, rectrice de l’université d’Edimbourg © DR

Jeune Afrique

Installée en Écosse depuis 2011, l’avocate spécialiste des droits de l’homme Debora Kayembe a été nommée début février rectrice de l’Université d’Édimbourg, l’une des plus prestigieuses du Royaume-Uni. Un poste qu’elle occupera à compter du 1er mars.

Militante des droits de l’homme

C’est en République démocratique du Congo que Debora Kayembe Buba fourbit ses premières armes. Née à Kinshasa il y a 45 ans, elle est élevée par sa tante paternelle et par son oncle, médecin, au sein d’une famille aisée, très proche du pouvoir de Mobutu Sese Seko. Elle grandit dans le faste, préservée.

À 19 ans, elle découvre les inégalités sociales et les injustices en pénétrant dans les bidonvilles de Kinshasa, réalise que les enfants pauvres de son pays ne mangent pas à leur faim, se révolte. Elle s’inscrit en droit à l’Université libre de Kinshasa et devient militante des droits de l’homme en rejoignant l’ONG Toges noires. Après un stage aux Nations unies, elle fait son barreau à Matadi dans la province du Bas-Congo et devient avocate spécialisée en droit international en 2000.

Forcée à l’exil

À son retour à Kinshasa en 2002, elle est recrutée par un cabinet d’affaires international et se rode aux problèmes de corruption rencontrés en RDC par les investisseurs étrangers. Puis le président Joseph Kabila l’envoie, avec d’autres représentants de la société civile, en Afrique du Sud pour une mission en vue de la formation d’un gouvernement de transition, et la nomme conseillère spéciale auprès de la Commission des droits de l’homme.

À ce titre, elle demande à conduire une enquête sur le massacre de Bunia dans l’Est du Congo, durant la guerre. Horrifiée par les témoignages recueillis et les preuves rassemblées faisant état de tueries, de tortures et de viols, elle s’apprête à remettre un rapport accablant pour le gouvernement de l’époque. Son nom circule. Des amis lui conseillent de quitter le pays au plus vite.

Linguiste

Debora Kayembe se réfugie au Royaume-Uni en 2005. Elle obtient le statut de réfugiée politique et un droit de résidence deux ans plus tard, alors qu’elle est installée dans le nord de l’Angleterre, dans la petite ville de Blackburn, près de Manchester, où officie le député Jack Straw, alors ministre des Affaires étrangères du gouvernement travailliste. Il interviendra en sa faveur pour qu’elle ne soit pas expulsée.

Parlant quatre langues, le français, le lingala, le kikongo et le swahili, elle travaille un temps comme interprète et traductrice pour la délégation locale du ministère de la Santé, s’adressant aux réfugiés africains, avant de monter sa propre société d’interprétariat, qu’elle développe à l’international.

Membre de la Société royale d’Édimbourg

Son diplôme d’avocate étant reconnu en Écosse, mais pas en Angleterre, elle part en 2011 s’installer à Édimbourg, avec ses deux jeunes enfants. Là, elle est autorisée à s’inscrire au barreau. En 2012, elle travaille pour le Scottish Refugee Council et entre à son conseil d’administration. En parallèle, elle devient experte auprès du bureau du procureur de la Cour pénale internationale pour assister les victimes de guerre. En 2016, elle est la première Africaine appelée à rejoindre la Société royale d’Édimbourg, l’équivalent de l’Académie des sciences et des lettres, à la commission Afrique.

Première personnalité noire à ce poste

En juillet 2020, dans le sillage du mouvement Black Lives Matter, elle lance la campagne Freedom Walk, mouvement des droits civiques pour promouvoir les réformes sociales, la justice raciale et l’entente communautaire en Écosse. En février 2021, elle est la première personnalité noire, la première immigrée africaine et la troisième femme depuis 1858 à être nommée rectrice de l’Université d’Édimbourg, l’une des plus prestigieuses du Royaume-Uni, qui occupe la 5e place en Europe et la 20e dans le monde du Classement mondial des universités QS.

Elle possède la troisième plus grande dotation de toutes les universités du Royaume-Uni, après les universités de Cambridge et d’Oxford.

Le mandat de la nouvelle rectrice est de trois ans, avec un agenda axé sur la lutte antiraciste, la promotion de la diversité et contre les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur. Parmi ses prédécesseurs de renom, on compte les anciens premiers ministres Winston Churchill et Gordon Brown.

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